Le problème du givrage au décollage concerne tous les avions quelque soit leur puissance. Le 27 décembre 1991, le vol Scandinavian 751 est sur le point de quitter Stockholm pour Varsovie. Le MD-81 a passé toute la nuit à l’aéroport par une température légèrement négative. Juste avant le départ, vers 8:30, un membre d’équipage inspecte visuellement l’avant de l’aile et ne trouve rien à signaler. Pourtant, un peu plus loin, de gros morceaux de glace sont accrochés. Un coup d’œil jeté à distance, n’est pas une inspection valable.
A 8:47, il commence son accélération sur la piste. A peine les roues quittent le sol que les pilotes entendent des bruits d’explosion et l’avion se met à vibrer. Les indicateurs du moteur 2, le droit, se mettent à trembler. Sans perdre de temps, les pilotes réduisent la puissance de ce moteur.
Cependant, le MD-81 était équipé d’un dispositif dont ni les pilotes, ni les compagnies ne savaient l’existence. Nous sommes au début des années 90, des mesures antibruit sont décrétées par de plus en plus d’aéroports. Au décollage, les pilotes doivent monter selon des trajectoires plus raides et réduire la puissance le plus tôt possible. Lors de certains incidents, s’est avéré le risque d’avoir une panne moteur à faible altitude après la réduction de puissance. Dans ce cas, l’appareil se retrouve avec un moteur éteint et le reste des moteurs fonctionnant à puissance réduite. Dans le stress, les pilotes peuvent ne pas penser à pousser les manettes à temps. Pour pallier à ce problème, McDonnell Douglas équipa ses appareils d’un dispositif appelé ATR pour Auto Thrust Restoration. En cas de panne moteur, ce système pousse les manettes vers l’avant. L’ATR du MD-81 était décrit dans le manuel de l’avion dans la section « lutte contre le bruit ». Personne n’avait lu cette section chez Scandinavian.
Alors que les pilotes réduisent le moteur 2 et se concentrent sur leurs instruments de vol, l’ATR pousse les deux manettes à leur maximum. L’avion rentre dans les nuages et les vibrations reprennent sur les deux moteurs. Au moment où il passe les 3’200 pieds, les deux moteurs s’arrêtent presque au même instant. Tous les pilotes vous le diront, se retrouver en plein nuages avec tous les moteurs en panne, c’est une situation à partir de laquelle on a peu de chances de prospérer.
Dans la cabine, un commandant de bord de la compagnie voyageait en tant que passager. Aux premiers signes de problèmes, il quitte son siège et se rue vers le cockpit. Son arrivée coïncide avec l’arrêt total des réacteurs. A trois, et grâce à un CRM de qualité, les hommes parviennent à réunir leurs ressources et gérer la crise de manière efficace. Le commandant de bord pousse sur le manche pour mettre l’avion en vol plané et gagner du temps. La tour de contrôle est informée et on tente de redémarrer les moteurs. Ni l’un, ni l’autre ne semblent accrocher quand l’appareil surgit des nuages à 900 pieds. La piste est trop loin et ne restent que les champs bordant l’aéroport. Le pilote aux commandes choisit le plus dégagé en oriente l’avion dessus. En cabine, les passagers sont informés de l’atterrissage d’urgence et se mettent en position de sécurité. Un nombre extraordinaire de taches sont exécutées correctement et en un temps record alors que l’altimètre égrène les pieds restants avant l’impact.
Le biréacteur transformé en planeur touche les arbres de la forêt de Göttrora et atterrit sur l’herbe enneigée ou il se casse en trois morceaux. Il en réchappe 129 personnes secouées mais dont aucune n’est sérieusement blessée. L’issue est un miracle et le drame a été évité de justesse grâce au sang froid des pilotes.
L’enquête révèle que les réacteurs ont été endommagés lors de la rotation suite à l’ingestion de morceaux de glace. Ceux-ci ne pouvaient venir que d’une accumulation au niveau de la partie arrière des ailes. Un contrôle plus sérieux au sol aurait permis de trouver puis d’éliminer ces dépôts.