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Les accidents de type CFIT ou Controled Flight Into Terrain

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Le vol contrôlé vers le terrain, ou CFIT, représente aujourd’hui un des accidents d’aviation les plus courants. Dans le cadre d’un CFIT, les pilotes contrôlent totalement l’avion mais se font une fausse idée de sa situation dans le plan vertical et/ou horizontal. La perception de la proximité du sol, de l’eau ou d’un obstacle n’arrive qu’aux tous derniers moments, voir pas du tout.

Le CFIT nait rarement d’une erreur ponctuelle. Il se construit pièce par pièce ; il est l’œuvre d’un système. Les facteurs de risque vont de la topographie du terrain à la qualité du management de la compagnie aérienne en passant par la formation et la sensibilisation des équipages.

James Reason donna en 1990 l’image d’un fromage suisse pour exprimer le passage d’une multitude d’erreurs à un accident. Chaque trou dans le fromage représente une erreur. Quand ils deviennent nombreux et importants, les trous en arrivent à communiquer entre eux et à créer un passage qui permet de traverser le bloc de part en part. C’est ainsi qu’arrive un CFIT.

 


James Reason - Modèle Fromage
Ici le modèle du fromage Suisse (c’est pas du gruyère, le gruyère Suisse n’a pas de trous). Chaque tranche, constitue un niveau de sécurité ou une barrière à franchir. Quand elles sont toutes franchies, c’est l’accident.
 

Facteurs de risques
Environnement :
Les terrains montagneux lors de vols de nuit ou en conditions de vol aux instruments (IMC) sont les plus risqués. De plus, si la piste n’est pas équipée d’un dispositif d’approche de précision, le risque est nettement augmenté. La pire situation consiste en une approche NDB, de nuit, en conditions IMC, sur un terrain accidenté avec un contrôle aérien ne disposant pas de radar. Même si la majorité des CFIT surviennent durant l’atterrissage, il est possible d’avoir ce type d’accident en toute phase du vol, y compris en montée. Les pistes avec un mauvais éclairage ou un éclairage inhabituel ou non-conforme sont des terrains à risque.

L’équipage :
Des pilotes ayant traversé de nombreuses zones horaires et atterrissant au terme d’un long temps de service sont les moins attentifs. Ceux qui effectuent un vol charter en-courent deux fois plus de risques que ceux qui font un vol régulier. La raison est que ces derniers sont relativement plus habitués aux terrains qu’ils desservent. Les compagnies charters travaillent en fonction du marché et leurs pilotes se retrouvent plus souvent sur des terrains qui leurs sont inconnus. Dans la même logique, les vols nationaux sont moins risqués. Leurs pilotes atterrissent plusieurs fois par semaine sur les mêmes terrains et en connaissent par cœur les spécificités.

Les compagnies de fret encourent encore plus de risques. Elles utilisent typiquement des avions anciens et leurs équipages ont un pilotage assez sportif. Elles desservent des terrains secondaires et volent surtout de nuit. Les instruments des anciens avions sont moins performants et peuvent constituer un facteur de risque supplémentaire.

Quand c’est le copilote qui est commandes, le risque est nettement moindre. Les commandants de bord ont une plus grande expérience et sont plus à même de détecter tôt les écarts de trajectoire. Au contraire, quand un copilote sent que quelque chose ne va pas, trop souvent il n’a pas le courage qu’il faut pour corriger le commandant de bord. Parfois c’est ce dernier qui ne tient pas compte des remarques du copilote. Ces situations témoignent de cockpits au fonctionnement pathologique.

Comportement :
Dans la quasi-totalité des CFIT, au moins l’un des membres de l’équipage exprime assez tôt des incertitudes sur la position de l’appareil ou s’inquiète de la proximité du sol. Ceci ne déclenche pas de réactions appropriées parce qu’il y a une perte de conscience de la situation, un déficit de communication ou un déséquilibre d’autorité dans le cockpit.

Culture de la compagnie :
si la compagnie attache une connotation négative aux remises de gaz, elle est un excellent candidat aux CFIT. Si un pilote a des doutes sur une approche, il doit être en mesure de l’annuler et de recommencer sans subir la moindre critique. Dans de nombreux accidents, le copilote initie une remise de gaz qui est annulée par le commandant de bord. Les opérateurs de jet d’affaires sont particulièrement concernés par ce point. Certains sont aux pilotes ce que les livreurs de pizza sont aux motocyclistes. De nombreux cas d’approches trop rapides et non stabilisées concernent ce type de trafic.

Un point positif est donné aux compagnies qui mettent en place un système permettant à leurs pilotes de rapporter des incidents sans encourir de mesures disciplinaires. Dans les autres compagnies, les problèmes restent cachés jusqu’au jour où un de leurs avions sort en première page des journaux.

D’après une étude réalisée par le NTSB en 1995, un des facteurs retrouvé dans de nombreux CFIT est la pression opérationnelle sur des pilotes pour qu’ils fournissent un service ponctuel et fiable dans un environnement incompatible avec une telle attente.

Cartographie :
La mise à disposition d’une cartographie de qualité est aussi un facteur positif. Les civils utilisent le plus souvent des cartes Jeppesen Sanderson, c’est parmi les meilleures au monde. D’autres cartes disponibles sur le marché ou produites en interne par les compagnies sont généralement moins bonnes. Les militaires volent avec des cartes à eux. Elles sont moins claires et leur ergonomie laisse à désirer. Certaines compagnies aériennes font l’économie d’un abonnement Jeppesen en dessinant leurs propres cartes. Ces dernières sont moins parlantes et constituent une prise de risque gratuite sachant que l’erreur de position est un facteur important dans de nombreux CFIT.

Toujours dans le chapitre cartographie, il est fréquemment reproché aux compagnies les plus fauchées de faire voler leur pilotes avec des cartes pas à jour. Les reliefs ne changent pas de position, mais il peut y avoir de nouveaux obstacles artificiels tels que des fils électriques ou des antennes. De plus, les balises au sol peuvent connaître des changements.

Le danger
Comparativement aux autres accidents, les CFIT sont particulièrement meurtriers. Selon une étude faite en Alaska, et tenant compte des évènements entre 1990 et 1998, plus de 70% des victimes du transport aérien ont été impliquées dans un CFIT. Dans l’aviation générale, la majorité des cas concernent des pilotes qualifiés pour le vol à vue mais qui se retrouvent en IMC par inadvertance.

GPWS
Aujourd’hui, l’appareil de base et en même temps le dernier rempart contre les CFIT est le Ground Proximity Warning System, appelé communément GPWS. Il fonctionne avec le radio altimètre et connaît de nombreux paramètres de l’avion tels que la position des volets, l’état du train d’atterrissage ou même la phase de vol. L’appareil dérive la hauteur réelle de l’avion par rapport au sol à chaque instant et en déduit le taux de montée ou de descente de l’avion. En traitant logiquement les informations obtenues, il est capable d’en déduire si la proximité du sol est légitime ou pas.

Le GPWS émet ses alertes par le biais d’une voix synthétiques et tous les pilotes sont sensés réagir de manière réflexe dès qu’ils la perçoivent. Typiquement, il s’agit de tirer sur le manche à la limite du déclenchement sur stick shaker tout en mettant à fond les gaz. De plus, comme le rappelle la FAA dans un de ses bulletins de 1998, il est important de vérifier la rentrée des spoilers sur les avions où ceci-ci ne se fait pas automatiquement. Il s’agit typiquement des Boeing.

Les messages vocaux sont nombreux mais un seul peut être passé à la fois. Le système dispose de priorités et c’est le message le plus urgent qui est émis quand plusieurs situations dangereuses se présentent en même temps.

Le GPWS connaît la valeur de l’altitude barométrique ainsi que sa variation, mais ne l’utilise que dans certains cas, comme lors de la perte d’altitude juste après le décollage. Dans ce cas, le message vocal est « Don’t sink! ». La voix ne s’entend pas seulement dans les situations désespérées, mais aussi dans les phases où les pilotes commettent des excès. Elle agit comme une aide à la prise de conscience de la situation. Par exemple, si un avion descend si vite qu’il touchera le sol dans 30 secondes, la voix annoncera « Sink Rate ! ». Ainsi le pilote fautif réduira son taux de chute et l’appareil se calmera. Par contre, si l’avion descend encore plus vite alors que le sol est proche, le message d’alerte devient « Whop! Whoop! Pull up ! ». Celui-ci, le pilote ne doit jamais l’entendre de sa carrière. C’est souvent le dernier message enregistré dans un CVR d’avion accidenté.

Le GPWS a un grave défaut. Il ne voit que le sol qui est en dessous de l’avion. Si un appareil s’approche d’une paroi verticale ou qui monte trop rapidement, le délai entre l’alarme et l’impact peut être d’une fraction de seconde. Actuellement, les équipementiers travaillent sur un enhanced-GPWS, eGPWS, ou GPWS amélioré. Ce dernier disposera d’une base de données mondiale des reliefs et pourra en tenir compte dans la génération des alertes aux pilotes. Ceci permettra de mettre en place des alertes précises et suffisamment précoces pour permettre un évitement.

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