Dans leur exercice de tous les jours, les pilotes sont tenus de prendre de nombreuses décisions qui découlent de choix imposés par les circonstances. Choisir, c’est prendre certaines voies, mais c’est aussi renoncer à d’autres. L’option d’annuler et de revenir en arrière n’est pas toujours disponible.
Le commandant de bord, qui est le décideur principal à bord d’un avion, doit pouvoir faire des choix éclairés qui ne sont pas forcément anodins. Annuler un vol peut coûter très cher à la compagnie aérienne et met tout le monde dans une situation délicate vis-à-vis des passagers et des partenaires techniques et commerciaux. Initier une évacuation, c’est 200’000 dollars de casse au niveau de l’avion, voir même des blessés ou des morts sur des mouvements de panique ou des bousculades. Si la décision est prise à bon escient elle passe, mais on ne le sait jamais d’avance. Parfois, on ne peut jamais le savoir du tout.
Plus une prise de position est importante, plus elle a de chances de mettre les pilotes à l’épreuve. Dans certains cas, elle fait reposer sur leurs dos un poids qu’aucun humain ne peut supporter sans défaillance.
Une bonne décision permet toujours d’arriver à bon port. Ce qui est, après tout, le but premier du pilote. Dès que les avions ont été inventés, on a vu la possibilité d’y embarquer des gens avec armes et bagages et de les transporter d’un endroit à l’autre contre de l’argent. Pour cela, il faut un appareil et il faut des pilotes. La raison d’être de ces derniers est la réalisation sûre de la mission. Tout le reste, passe, ou devrait passer, après.
Par contre, et c’est là que les choses se compliquent, une mauvaise décision permet, dans de nombreux cas, d’arriver à bon port également. Les avions sont conçus pour pardonner une erreur ou une série d’erreurs tant qu’elles ne concourent pas toutes dans le même sens. Ce phénomène permet de faire tourner certaines compagnies dans un mode dégradé afin de réaliser plus de bénéfices. En effet, plus on fait d’économies sur la sécurité, plus les bénéfices à court terme, voir les actions en bourse, remontent. De nombreux ouvrages traitent de ce point précis. En tous les cas, il ne faut jamais considérer comme bonnes des décisions parce qu’un vol s’est quand même bien terminé.
Afin de juger, on doit avoir la capacité de distinguer entre les bonnes et les mauvaises solutions. On peut même rajouter qu’une fois cette distinction faite, il faut avoir l’attitude d’esprit qui consiste à aller vers la bonne. A ce point il s’agit d’éthique, mais de nombreux autres facteurs peuvent entrer en ligne de compte et influencer tout le processus. Par exemple, il n’est pas possible de s’attendre à un comportement sain de la part d’un équipage fatigué. De nombreux accidents ont eu lieu par-ce que les pilotes ont pris des décisions inconcevables qui prouvent qu’ils étaient dans un état diminué. A coté de phénomènes marginaux comme l’alcool ou des maladies cachées, on peut aussi trouver des situations de prise de médicaments qui sont assez courantes. Une fois que les pilotes ne sont pas en l’air, ils doivent aller à l’hôtel et dormir vite pour être d’aplomb pour le vol du lendemain. Dans de nombreuses issues dramatiques, les analyses révèlent la présence de substances somnifères consommées sans ordonnance. Les voyages et les décalages horaires donnent facilement des troubles de sommeil. Même si l’effet d’une nuit blanche est plus incapacitant que l’effet résiduel d’un somnifère sans ordonnance, la question reste intéressante.
Un jugement peut être faussé par la qualité et la disponibilité d’informations nécessaires à sa réalisation. Cela peut aller de l’erreur d’interprétation d’un message du contrôleur, jusqu’à un manque de connaissances du pilote dans certains domaines ayant trait à son métier. Il n’y a pas que le pilote qui se trompe, les techniciens, les contrôleurs, les managers de la compagnie… etc. peuvent prendre individuellement ou collectivement des positions qui compromettent la sécurité des vols.