Home Pannes Mécaniques Perte de contrôle sur Aeromexico vol 945 – Piège du Pilote Automatique

Perte de contrôle sur Aeromexico vol 945 – Piège du Pilote Automatique

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L’usage inapproprié du pilote automatique est à l’origine d’un nombre important de crashs et de pertes de contrôle. Dans la soirée du 11 novembre 1979, un DC-10 d’Aeromexico décolle de Francfort et tourne vers l’ouest à destination de Miami en Floride. A son bord, il y a 311 personnes partant presque toutes à Mexico.

Le commandant maintient un pilotage manuel jusqu’à 10’000 pieds à la vitesse de 282 nœuds après dérogation du contrôle aérien. Puis, le pilote automatique est engagé en mode maintien de vitesse verticale et l’altitude de 31’000 pieds est sélectionnée. Tout en continuant à monter, l’appareil commence à perdre progressivement de la vitesse. En effet, si les performances des réacteurs et des ailes sont maximales au niveau de la mer, elles se dégradent rapidement avec l’altitude. Le taux de montée possible juste après le décollage devient impossible à tenir à haute altitude. Le pilote automatique tire progressivement sur le manche pour maintenir le taux de montée et la vitesse baisse malgré la poussée des réacteurs. Ni le cabré de plus en plus important, ni la baisse constante de la vitesse n’alertent les pilotes.

A l’approche des 30’000 pieds, les premières vibrations aérodynamiques annonciatrices d’un décrochage se font sentir. Revenant soudain dans la boucle, les pilotes donnent une mauvaise interprétation aux vibrations. Pour eux, c’est le réacteur droit, le trois, qui est entrain de présenter un pompage de compresseur. Le commandant prend la manette de ce réacteur et la réduit vers le ralenti. La vitesse baisse brutalement à 173 nœuds, soit 30 nœuds en-dessous de la vitesse de décrochage à cette altitude.

Tout en restant fortement cabré, le DC-10 se met à tomber comme une pierre. Par moments, le taux de chute dépasse les 15’000 pieds par minute. L’avion s’incline dangereusement à droite et à gauche, mais par chance, il ne part pas sur le dos. Il faut près d’une minute aux pilotes pour comprendre qu’ils sont face à une situation de décrochage. Dans un premier temps, ils tirent sur le manche jusqu’en butée et l’appareil ne fait que s’enfoncer. Enfin, le commandant de bord fait le bon geste et pousse sur le manche. La récupération commence immédiatement favorisée par la sortie automatique des slats. L’avion se stabilise en-dessous de 19’000 pieds et les passagers sont rudement secoués. Un bout de l’extrémité de chaque aile manque ainsi que plus de 2 mètres de gouverne de profondeur.

Les pilotes remettent les gaz et remontent à leur altitude de croisière. Dans un premier temps, ils pensent atterrir à Madrid puis changent d’avis et continuent sur Miami où les dégâts sont constatés.

L’enquête démontra un incroyable manque d’attention. Sans le dire directement, le rapport du NTSB laisse à penser que l’équipage faisait autre chose que de piloter durant la montée. Le sort de l’avion était confié au pilote automatique et personne ne suivait l’évolution des paramètres de vol jusqu’au moment où l’avion décrocha.

Sur le DC-10, le pilote automatique a un mode de navigation verticale et un système automanettes qui gère la puissance des réacteurs. Ce dernier système peut soit maintenir un régime fixe, soit ajuster le régime pour maintenir une certaine vitesse. A son tour, le système vertical agit sur le cabré de l’avion et peut, à la demande, maintenir soit un taux de montée constant, soit une vitesse constante. La vitesse peut être maintenue par l’un ou l’autre (condition XOR) des systèmes, mais jamais par les deux en même temps.

A un moment donné, alors que le système vertical maintenait une vitesse constante, le commandant de bord demanda au système automanettes de maintenir une vitesse constante également. Le mieux est l’ennemi du bien ! Le DC-10 n’est pas conçu pour fonctionner de cette façon. A cet instant, le pilote automatique passa en mode de maintient de vitesse verticale et l’automanettes en mode de maintient de vitesse indiquée. La valeur de référence était de 320 nœuds.

L’avion continua à monter à 1’200 pieds par minute mais plus il montait, plus ce taux devenait difficile à tenir. L’automanettes avança progressivement les gaz jusqu’à atteindre le maximum continu et la vitesse commença à revenir en arrière. Tout se passa très vite. Au passage du niveau 250, la vitesse est de 318 nœuds et l’avion encaisse encore le coup. Quatre minutes plus tard, elle n’est que de 226 nœuds avec l’avion presque aussi cabré qu’au moment du décollage. Le pilote automatique n’a pas de système de protection contre ces situations. Si une vitesse verticale est demandée, il ira la chercher quitte à faire décrocher l’avion.

Par ailleurs, on ne peut que s’étonner du choix d’entamer un vol transatlantique après un incident si grave. Par chance, l’avion fut en mesure de finir son vol malgré les dégâts importants qu’il avait subi.

 

Aeromexico XA-DUH DC-10-30
Etat du PHR et gouverne de profondeur gauche

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